Nymphe au fil : l'avenir de la pêche à la mouche ?

Nymphe au fil : l'avenir de la pêche à la mouche ?

Je  n'ai pas souvent l'occasion de rencontrer des pêcheurs qui ont l'intelligence et le bon goût d'être un peu à l'écoute. Mais lorsque c'est le cas, et cela m'arrive de temps en temps, c'est avec un grand plaisir que j'essaye de partager ma passion et que je donne quelques conseils que je pense utiles. Pour moi c'est toujours une grande satisfaction de faire prendre un poisson en sèche ou en nymphe à vue, surtout si le pêcheur est un débutant.

J'apprends aussi beaucoup en faisant faire... Parfois plus qu'en faisant moi-même. Ce week-end, en observant un moucheur en action, j'ai pu remarqué que tant qu'il pratiquait en sèche, les poissons restaient actifs. Il y avait au moins deux beaux poissons et deux ou trois plus petits actifs en surface. Des poissons très pêchés en sèches, déjà certainement piqués et qui sont devenus très méfiants et sélectifs mais qui, avec un peu de métier, restent prenables... J'ai vérifié, le lendemain!  Un des jolis poissons piqué grâce à un de mes conseil mais pas seulement, il y a eu aussi l'écoute et l'adresse du pêcheur, nous laissera le souvenir d'un bon moment de plaisir partagé. Un confrère qui serait venu prendre la place laissée libre dans la soirée aurait eu, lui aussi, son moment de plaisir en s'attaquant à ces quelques gobages. Mais, après un passage en nymphe au fil, d'ailleurs guère plus fructueux que la sèche, tous les poissons qui avaient occupé le moucheur et sa compagne pendant une bonne partie de l'après-midi ont été calés en moins d'un quart d'heure. Et ils le sont restés certainement durant toute la fin de journée. Il en est souvent ainsi. Après des compétitions j'ai remarqué qu'il fallait au moins une ou deux semaines avant que les poissons redeviennent actifs en surface, sur les secteurs où ils avaient été matraqués à la nymphe.

Certes dans de nombreux secteurs de nos rivières, les insectes disparaissent, et les poissons aussi, Comment peut-il en être autrement ? Les aléas climatiques liés aux modifications du climat et aggravés par l'action de l'homme toujours en recherche de profits causent des dommages de plus en plus irréversibles. Et on voudrait que la nature se refasse seule... Quelle hérésie !

En cherchant à s'adapter à des conditions dégradées et souvent par manque de patience, on finit par détruire ce qui reste de la vraie pêche à la mouche et des fabuleuses sensations qu'elle peut procurer.

Les savoirs se perdent.

Le "puriste", une espèce en voie de disparition,  qui sait trop bien se fondre discrètement dans son environnement et en tirer partie tout en le respectant, un vrai "sportsman", passe pour un couillon ! Et si c'est un ancien comme moi, il ne lui reste plus qu'à pêcher... Dans ses souvenirs !... Ou à laisser de côté ses convictions… Ce qui est bien  triste !

Le business a remplacé l'éthique qui faisait appel au bon sens et à la qualité. Les marchands de matériel et les guides de pêche font leur beurre avec la pêche à la nymphe au fil, les néophytes prennent quelques poissons, les spécialistes "cartonnent", les Fédérations vendent des cartes : tout le monde est content !... Mais pour combien de temps ?... «  Tant va la cruche à l'eau qu'à la fin elle se casse ».

Alors, la nymphe au fil, l'avenir de la pêche ?

Dans le contexte actuel de gestion de notre patrimoine halieutique, c'est, à mon avis, juste une manière de prendre un peu plus d'élan pour mieux se précipiter dans le vide !

 

 

 

         Photo : Pierre Cadiran
Photo : Pierre Cadiran